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Bukavu : triste souvenir du 29 octobre 1996, la ville de Bukavu tomba sous contrôle des troupes rwandaises de l’AFDL.

Uvira venait de tomber 4 jours auparavant (25 octobre 1996).
Quelques fragments de mémoire autour de la chute de Bukavu :
=> Quelques jours avant que Bukavu ne tombe sous contrôle de l’AFDL, la ville avait accueilli des troupes des Forces Armées Zaïroises (FAZ), en provenance du Camp Kokolo (Kinshasa), les fameux « Hiboux ». Devant le vice Gouverneur de l’époque Lwabanji Lwasi Ngabo, ils avaient demandé la permission de faire incursion au Rwanda, indiquant que dans les heures qui allaient suivre, le drapeau du Zaïre allait flotter à Cyangugu. Il y avait aussi le bataillon des parachutistes « Béret Rouge » (commandés par le Major Kayembe) positionné à la frontiere de Ruzizi II et vers les collines du Camp Saïo. Le Général rwandais Gratien Kabirigi, à la tête d’ex-GP (Garde présidentielle de Juvenal Habyarimana), était aussi présent dans la ville. Avec les armes lourdes placées devant la Cathédrale Notre-Dame-de-la-Paix de Bukavu et l’Institut de Bagira, personne ne pouvait s’imaginer que la ville de Bukavu allait tomber.
=> La veille de la prise de la ville par l’AFDL, une important cérémonie y avait été organisée : l’entrée en fonction du nouveau Gouverneur, le Général Michel Elesse (officier militaire nommé par le Maréchal-Président Mobutu Sese Seko, en remplacement du Gouverneur Pasteur Kyembwa Walumona, rappelé à Kinshasa plusieurs semaines auparavant). Le même jour, en début de soirée, conscients qu’ils ne pouvaient plus sécuriser la ville, les éléments des Forces Armées Zaïroises (FAZ) qui y étaient déployés, avaient pillé notamment le bureau du CICR sur Avenue Kibombo. La fête des militaires en fuite! Mais une bonne partie de la population tenait à rester coûte que coûte dans la ville…
=> Le message de Monseigneur Christophe Munzihirwa Mwene Ngabo, donné à la Cathédrale Notre-Dame-de-la-Paix de Bukavu 2 jours auparavant (dimanche, 27 octobre 1996, pendant que Uvira était tombée déjà), résonnait dans les oreilles : « Ne quittez pas la ville. » Les militaires zaïrois en fuite avaient, quant à eux, un autre message : « Bateki mboka. » (« Ils ont vendu la cité »).
=> Le 29 octobre 1996, c’était un mardi. Le matin, les éléments des Forces Armées Zaïroises se positionnent vers le Lycée Wima, Bugabo, et commencent à lancer des obus vers le quartier Essence. Difficile de dire exactement vers quelle cible ces obus étaient lancés. Et donc pour la plupart des familles, rester à la maison sans savoir ce qui se passait n’était pas une bonne idée. C’est ainsi que plusieurs familles habitant les quartiers du centre-ville décideront de sortir de leurs maisons et de fuir vers Miti, Mudaka, Kavumu, etc.
=> En début d’après-midi, après l’annonce par Rfi de la chute de la « ville » de Nyantende (ville, pas village svp), les militaires et leurs familles avaient dégarnis Bukavu. La ville n’avait aucun système de défense. Chaque gradé avait déjà son butin de guerre avec lequel il pouvait rejoindre Kinshasa (soit une Land Cruiser, soit une Land Rover ou autres 4×4 pillés du HCR et autres ONG internationales opérant dans la ville). Quelques braves éléments du Contingent Congolais pour la Sécurité des Camps (CCSC) étaient encore visibles dans la ville ce 29 octobre. Nombreux d’entre eux mourront, pris en étaux.
=> La ville de Bukavu est donc tombée sans véritables combats. Les militaires tués étaient soit en fuite dans une jeep, soit en errance, soit alors au mauvais endroit et sans information sur ce qui se passait. Les gradés avaient abandonné les soldats. Sans commandement, c’était la débandade. Ceux qui avaient essayé de défendre un peu la ville, ce sont les éléments du Général rwandais Kabirigi, qui s’étaient organisés à partir de La Botte (chez Chamukina hotel), et c’est ce groupe qui s’était battu toute la nuit pour minimiser le carnage des camps de Kashusha I et II.
=> Vers 14h, ce 29 octobre, c’était la débandade. Civils et militaires abandonnèrent la ville. On a encore en mémoire ces scènes des miliaires des FAZ en train de se déshabiller et de jeter leurs treillis militaires. Vers 15h, on va signaler la présence des soldats rwandais dans la ville. Ces derniers venaient de traverser la frontière de Ruzizi I et avaient pris possession des points névralgiques de la ville. C’est aussi à ce moment même beaucoup de familles commenceront à évacuer le centre-ville pour aller dans les périphéries (Kadutu, Bagira, etc), et d’autres continueront leur périple aux fins fonds des territoires, voire jusqu’à Kisangani.
=> Malheureusement, c’est durant ces heures d’après-midi que plusieurs personnes périront dans la ville. Il était clair que les militaires rwandais avaient reçu la consigne selon laquelle tout celui qui cherchait à sortir de la ville à bord d’un véhicule était proche du pouvoir de Mobutu. Plusieurs personnes et familles seront tuées dans ces circonstances.
=> Vers 17h, après une petite pluie, des chants militaires en Swahili et en Kinyarwanda sont entonnés au Camp Saïo (le plus important camp militaire de la ville). Les « wakombozi » (libérateurs) avaient pris possession de la ville. Monseigneur Christophe Munzihirwa (Archevêque de Bukavu), Jean-Pierre Biringanine un haut cadre de l’UDPS, Mwelwa et Alphonse (tous deux footballeurs très connus dans la ville) et bien d’autres anonymes seront assassinés ce 29 octobre 1996.
=> Trois jours plus tard (1er novembre 1996), la ville de Goma tombait à son tour. L’AFDL contrôlait ainsi Uvira, Bukavu et Goma.

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